Procès-spectacle d’Orléans : « Les femmes qui écrivent sont-elles dangereuses ?  » 1/7

La question peut prêter à sourire mais elle est en fait très sérieuse. Surtout quand on sait qu’aujourd’hui encore dans certains pays les femmes sont emprisonnées ou tuées pour avoir osé défié le pouvoir en place avec leur plume. D’où l’intérêt de cette mise en scène sous forme de procès-spectacle le 9 octobre 2021 en clôture des Voix d’Orléans au tribunal de grande instance de la cité johannique. Compte-rendu d’audience avec les exposés de la Présidente de l’audience, de la Procureure et du Ministère Public pour l’accusation.

par Claire Boutin

Un procès-spectacle s'est penché le 9 octobre 2021 à Orléans sur la question : "Les femmes qui écrivent sont-elles dangereuses ?"
Dans le box des « accusées », Viktor Lazlo et Suzanne Dracius. Photo Sophie Deschamps

« Les femmes qui écrivent sont-elles dangereuses ? « 

Voilà le mobile de ce procès « pour rire ». Toutefois, les apparences étaient bien celles d’une véritable audience : salle de tribunal, une présidente de séance (incarnée par la journaliste judiciaire Frédérique Lantiéri), deux accusées (Viktor Lazlo et Suzanne Dracius), une avocate générale( Fawzia Zouari), une procureure (Sylvie le Clech), huit témoins, moitié à charge et à décharge et même une experte psychologique (Sylviane Giampino). Donc bien sûr uniquement des femmes, excepté quelques hommes dans l’assistance.

Le mobile, lui, était très clair :  » Les femmes qui écrivent sont-elles dangereuses ? « 

Un délit énoncé en ces termes par la Présidente du tribunal :

 » En préambule, il convient de dire que les femmes qui vont parler en qualité de procureure et de témoins de l’accusation ne sont pas du tout d’accord avec les arguments qu’elles vont vous exposer.

Il convient aussi de replacer dans leur contexte les faits qui vous sont reprochés. Aujourd’hui, les écrivaines ne sont plus soupçonnées de frigidité ou d’infertilité. Mais plus que jamais elles déstabilisent notre société, elles sapent le fondement de notre culture et de nos religions.

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Femmes voyageuses

Le 7 octobre 2021, des femmes du Parlement des écrivaines francophones ont parlé des femmes voyageuses du XIXe siècle sous le titre Voyageuses et espionnes : de fabuleux destins.

Table ronde "Voyageuses et espionnes : de fabuleux destins le 7 octobre 2021 aux Voix d'Orléans animée par Catherine Fruchon-Toussaint, journaliste à RFI avec de gauche à droite Muriel Augry, Laurence Gavron et Fawzia Zouari.
Table ronde « Voyageuses et espionnes : de fabuleux destins le 7 octobre 2021 aux Voix d’Orléans animée par Catherine Fruchon-Toussaint, journaliste à RFI avec de gauche à droite Muriel Augry, Laurence Gavron et Fawzia Zouari. Photo Sophie Deschamps

Parmi les autrices qui sont intervenues dans cette table-ronde, Fawzia Zouari nous explique que dès le XIXe siècle, les femmes ont eu sur l’Orient un regard très différent de celui des hommes.

Quand les femmes partent en Orient, c’est beaucoup plus que de la curiosité, c’est une forme d’altérité extraordinaire. Et très souvent, non seulement elles y vont mais elles y restent. L’Orient devient leur destin. Les historiens se sont rarement arrêtés là-dessus. Il faudrait que nous les femmes nous mettions en valeur leur point de vue.

D’autant que dans l’Histoire, ce que l’on a retenu ce sont très souvent les oeuvres et les faits des hommes. Et l’on a ou bien effacé ou bien oublié ou bien mésestimé l’oeuvre des femmes. Et moi, je sais qu’il y a des femmes extraordinaires que l’on a passées sous silence. De plus, ces voyageuses on ne les prenait pas au sérieux. C’étaient des aventurières, des folles légères…On ne pensait pas qu’elles avaient une approche, une pensée, un « être au monde » différents. Donc nous avons aujourd’hui l’obligation et le devoir de redécouvrir cette histoire au féminin, des premiers siècles jusqu’à maintenant.

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La domination masculine racontée par l’écrivaine malgache Michele Rakotoson

Membre du parlement des écrivaines francophones, l’autrice et comédienne malgache MIchèle Rakotoson était présente aux Voix d’Orléans les 7, 8 et 9 octobre 2021. Elle a dénoncé la domination masculine au cours de la conférence femmes et violences. Des paroles fortes et une colère froide et assumée qui se passent de commentaires.

par Claire Boutin

L'autrice malgache Michèle Rakotoson a parlé de domination masculine aux Voix d'Orléans en octobre 2021
L’autrice et comédienne malgache Michèle Rakotoson a parlé de domination masculine aux Voix d’Orléans début octobre. Photo Sophie Deschamps

Avant toute chose, je me situe.

Je sais ce qu’est le viol. Je le sais dans ma chair.

Je sais ce qu’est être battue. Je l’ai vécu. Je sais ce qu’est l’humiliation. J’en suis revenue et je sais me défendre. Je peux donner des coups. 

Je sais ce qu’est le statut économique minorisée. Je ne ferai pas une dissertation mais je sais gérer le peu.

Je sais ce qu’est un regard condescendant, on ne me la fait pas. Maintenant, je cogne. 

Je sais ce que c’est qu’être une femme noire, issue de l’un des pays le plus pauvre du monde (Madagascar) et je dis : « Et alors ? » C’est comme ça et ce n’est pas autrement. Essayez si vous y arrivez !

La résilience est venue et elle a fait de moi une femme particulièrement solide et sereine. Et aujourd’hui j’ai envie de dire que l’une des plus grandes violences que j’ai vécues en tant que femme fut peut-être symbolique. 

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L’Appel d’Orléans du Parlement des écrivaines francophones

Les 7,8 et 9 octobre 2021, la mairie d’Orléans a donné une carte blanche au Parlement des écrivaines francophones dans le cadre des Voix d’Orléans. Une trentaine d’écrivaines du monde entier ou presque ont ainsi fait le déplacement avec un Appel lancé le samedi 9 octobre conjointement depuis Orléans par la mairie et le Parlement.

L'appel d'Orléans lu par Fawzia Zouari présidente du Parlement des écrivaines francophones
Fawzia Zouari, présidente du Parlement des écrivaines francophones a prononcé un Appel à l’issue des Voix d’Orléans. Photo Sophie Deschamps

Parmi les moments forts de cette manifestation, on retiendra l’Appel d’Orléans prononcé le 9 octobre depuis l’Hôtel Dupanloup par Fawzi Zouari, présidente du Parlement des écrivaines francophones et dont voici le texte intégral :

Aux militantes, résistantes, actrices, et acteurs de la société civile investi.e.s dans le combat féministe, nous voulons joindre notre voix pour dénoncer les aberrations qui durent.

Comment se fait-il qu’une planète qui compte pour moitié des femmes continue à être dominée, commandée, gérée par une majorité d’hommes ?

Comment expliquer la présence, minime, des femmes dans les postes de décision et les organismes internationaux, dans des institutions censées parler de paix et de tolérance, oubliant de décliner ces deux valeurs au féminin ?

Peut-on admettre que certains régimes politiques continuent de se définir comme des démocraties, là où les femmes sont ostracisées, discriminées, parfois violées dans l’impunité totale ?

Peut-on parler de printemps révolutionnaire à propos de révoltes qui échouent à établir une véritable émancipation des femmes, quand elles n’aspirent pas ou n’appellent pas à leur asservissement ?

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